Le Bagne

Les origines


Il faut remonter jusqu'en 1748 pour trouver le point de départ de notre histoire.
A la mort de Philippe d'Orléans, Louis XV rattache le corps des galères à la Marine et celle-ci se trouve en charge de navires vétustes et dépassés militairement, mais surtout de la chiourme qui s'y trouve. Elle saisit l'opportunité de développer et rénover ses grands ports de guerre et dirige vers Toulon (1748) puis Brest (1749) et Rochefort (1767) cette main d'oeuvre peu onéreuse.

Dès 1793, la nouvelle république se débarrasse de ses opposants politiques et religieux en les expédiant en Guyane déjà connue pour des essais de colonisation infructueux (expédition de Kourou en 1763), suivent les déportés de Fructidor (Billaud-Varenne, Collot d'Herbois, Pichegru, ...)

1848 est l'année qui ouvre la voie aux bagnes d'outre-mer; l'abolition de l'esclavage qui a réduit la main d'oeuvre coloniale, peurs sociale et politique qui font suite aux évènements de Juin 1848, l'exemple de Botany Bay (développement colonial anglais en Australie) et l'industrialisation des arsenaux de la Marine. La loi sur la Transportation se profile.
Après avoir hésité entre plusieurs sites, on repense à la Guyane pour l'exécution de la peine des travaux forcés.

Dès 1852, on offre ce choix aux forçats des bagnes portuaires et l'espoir d'un adoucissement de leur condition décide environ 300 d'entre eux à embarquer sur l'Allier direction Cayenne.



L'histoire

De 1852 à 1867, l'histoire du Bagne est chaotique; Ayant du quitter les îles du salut devenues trop petites,les transportés arrivent sur la "grande terre"; Des camps fleurissent un peu au hasard,puis disparaissent quand la main d'oeuvre pénale et son encadrement, décimées par les maladies ne peuvent plus y subsister; les bagnards construisaient des briqueteries, pour fabriquer leurs propres geôles.





En 1867, le taux de mortalité de la population pénale est tel que le législateur s'émeut et suspend la Transportation pour les blancs, les dirigeant sur la Nouvelle Calédonie ; Mais dans ces îles, l'opposition des populations locales et des colons fut farouche et le" petit paradis" de l'île des pins apparut bien peu dissuasif...dès 1887, les Transportés reprirent le chemin de la Guyane, associés cette fois aux récidivistes qui tombaient sous le coup de la relégation (loi du 27 Mai 1885)

Au cours de l'année 1923, une visite va ébranler l'institution, ou plutôt l'opinion publique, en mettant au grand jour les disfonctionnements et les injustices de ce systéme carcéral ; Durant un mois (du 8 aout au 7 septembre ) le grand reporter Albert Londres va effectuer une enquête sans complaisance, largement diffusée dans la presse natinale, qui aménera une discussion à l'Assemblée Nationale en novembre 1924, puis la création d'un décret trés important en septembre1925, qui, sans supprimer la peine, la rendra plus humaine et plus décente.



"Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus que de faire du tort.
Il est de porter la plume dans la plaie"

Le systéme perdurera ainsi jusqu'au du dernier convoi de novembre 1938. C'est l'arrivée du front populaire et le rapport de Gaston Monnerville député de la Guyane,en 1937 qui vont accélérer la fin du bagne ; Six mois avant le départ des derniers relégués de Saint Martin de Ré, le décret-loi de juin de la même année, réformait la loi sur la Transportation et instituait sa suppression.Il restait a ce moment là en guyane, prés de 3300 condamnés, autant de libérés astreints au doublage et environ 2000 relégués .Le rapatriement de cette population pénale dans des centrales construites à cet effet ne put se faire devant l'imminence de la guerre....




La Seconde Guerre Mondiale divisera la population du Bagne comme celle de métropole, entre Vichy et Londres. Les surveillants militaires s'opposent, les bagnards tentent de quitter leur condition en rejoignant la France Libre côté Surinam . S'exprime alors la volonté d'un raffermissement d'une réglementation jugée trop laxiste ; Le colonel Camus, ancien directeur de poulo Condore, en poste au 1er septembre 1941, applique une discipline de fer. Ajouté à cela, le manque de ravitaillement et la mise au travail des relégués , alors que ce n'est pas l'objet de cette condamnation,font qu' à la fin de la guerre, en 1944, lorque nommé par le général De gaulle pour "liquider" le bagne,le lieutenant colonel SAINZ prend ses fonctions, il trouvera une population pénale diminuée de plus de la moitié. Jamais le Bagne n'avait connu ce niveau de mortalité.



De 1945 à 1949, l'Armée du Salut soutiendra et aidera les derniers bagnards à retourner en métropole où à se forger un nouvel avenir, Ch. Péan, les Waélly, les Chastagnier: autant de noms et de familles au charisme et à la générosité reconnus.
Le 1er Août 1953, les derniers témoins, Bagnards ou Surveillants rentraient en France sur le "San matteo", ainsi prenait fin une aventure de cent ans.


Les Bagnards


Les Déportés

La première époque concernant des prêtres réfractaires et des politiques se situe dès la révolution et dans des endroits différents (Sinnamary, Cayenne ...). Dès la fin du 19ème siècle, l'île du Diable, la plus petite et la plus aride des îles du Salut devient le lieu officiel de la Déportation et son plus célèbre pensionnaire sera Alfred DREYFUS.

Les Transportés

Issus des cours d'assises, il s'agit des "durs", répartis en trois classes, la troisième étant la catégorie la plus basse (souvent celle à l'arrivée), la première étant la plus enviable, qu'on ne pouvait atteindre qu'après de nombreuses années sans punition.
Accueillis à Saint Laurent du Maroni, les Transportés pouvaient suivant les indications figurant sur leur dossier y rester ou être envoyés vers les îles du salut ou même les camps forestiers pour les plus mal notés.


Les Relégués
Sous le coup de la loi de 1885, ces multirécidivistes appelés "pied-de-biche" étaient méprisés de tous les autres condamnés et même des surveillants.


Deux catégories :
  - Les relégués collectifs
Vivant au camp de Saint-Jean, ils fournissaient une somme de travail quotidien à l'A.P. et devaient répondre à deux appels par jour.

  - Les relégués individuels
Sortis de la première catégorie grâce à un bon classement, ils pouvaient aller en semi liberté et obtenir des concessions à exploiter.

Voici les premières strophes du "commandement des relégués" :
Pour te conserver bien portant
Au soleil travaille rarement
Du commandement des surveillants
N'écoute jamais le boniment
Débrouilles toi n'importe comment
Afin de gagner quelque argent ...



Les femmes bagnardes
Le décret du 20 août 1853 autorise l'envoi des individus des deux sexes , d'origine africaine ou asiatique,aux travaux forcés en Guyane ; Il sera complété par l'article 4 de la loi sur la transportation de 1854 :
"Art.4 : les femmes condamnées aux travaux forcés pourront être conduites dans un des établissements créés aux colonies; elles seront séparées des hommes et employées à des travaux en rapport avec leur âge et avec leur sexe . "



Ainsi, dés 1858 un convoi de 36 transportées arrive par la Loire. Elles seront prises en charge par les soeurs de St Joseph de Clunny, historiquement déjà présentes dans les prisons métropolitaines



Ces condamnées seront suivies d'autres malheureuses ,destinées a servir de compagnes aux bagnards et a repeupler la colonie ! ( les directives ministérielles de juin 1858 en témoignent, indiquant qu'elles doivent être jeunes, en bonne santé et si possible campagnardes....); En 1887 arrivent les premiéres reléguées , au total c'est presque 2000 femmes qui seront envoyées dans les bagnes coloniaux de Guyane et de Nelle Calédonie . Il faudra attendre le 19 juillet 1907 pour que soit votée la loi sur la suppression de l'envoi des femmes.